Sursimplification et mirages... les dangers de la vulgarisation et du racolage de l'éducation positive
Publié le 25 Mars 2016
Aujourd'hui le cerveau fait vendre. Les neurosciences font vendre. La parentalité positive fait vendre. Je suis la première à dire que l'éducation positive s'apprend et se contruit car elle est précédée de la déconstruction de nos automatismes. Et tout cela s'apprend par les livres notamment (ou conférences, ateliers, etc...). J'ai beaucoup lu sur la question et je dévore encore et encore des montagnes de livres. Voilà donc qu'aujourd'hui je souhaite mettre en garde sur tout le côté vendeur/marketting. Les médias de masse (particulièrement sur l'Internet) se sont emparés du la poule aux oeufs d'or. Mais à quel prix?
1. Celui de la sursimplification à outrance. Et cela me paraît dangereux. Evidemment que vulgariser les études et connaissances est quelque chose de primordial. Mais, selon moi, cela ne doit pas être au détriment de la qualité voire de la vérité parfois.
2. Celui du mirage: faire croire à des méthodes clés en mains. Très souvent, cela relève d'une démarche ultra racoleuse en plus. On voit fleurir des sites/blogs/articles/billets présentant "10 trucs pour apprendre à gérer son stress", "5 phrases à dire à son enfant pour ceci ou cela". Et cela est partagé et (re)partagé sur les réseaux sociaux. Selon moi les différents ouvrages lus, les différentes conférences visionnées, sont d'une grande aide. Mais je garde mon libre arbitre. Tous ces outils ou solutions à consommer doivent être pris pour ce qu'ils sont: des exemples de situations. Souvent, ils n'ont pas ma confiance (quand il n'y a pas de mention de source principalement), même si, je l'accorde, ils peuvent être une base, une sorte de tremplin vers l'approfondissement.
3. Celui de la qualité. Il y a de plus en plus de coachs autoproclamés, de formateurs pas toujours au niveau. Le plus dommage dans l'histoire c'est qu'ils ne font pas honneur à leur profession. Une poignée de charlatans opportunistes vient noircir le tableau alors qu'à côté de ça il existe une énorme majorité de coachs et formateurs de qualités et ultra bienveillants.
Je suis ravie que l'offre sur l'éducation positive de manière générale s'élargisse. Je suis ravie de voir de plus en plus de livres sur le sujet sur les étalages de librairies. Je suis ravie de voir fleurir des sites et blogs sur le sujet. C'est cela qui fait que ce type d'éducation est diffusé. Mais je regrette que parfois la qualité ne soit pas au rendez-vous, ou que l'on prenne le lecteur pour un abruti en lui faisant croire à des solutions miracles qui n'ont de miraculeuses que le nom. Je pense aussi que certains produits peuvent même aller jusqu'à desservir la cause de cette éducation. Prenons l'exemple d'un parent ou d'un enseignant qui découvrent tout juste ceci, tentent de le mettre en application avec les différents conseils clés en main proposés. Le risque est qu'ils s'en détournent aussi vite, constatant que cela ne "fonctionne pas". Evidemment ceci est mon avis et cela n'engage que moi.
Personnellement, je prends, je laisse, je fais à ma sauce. Lorsque je lis un ouvrage, tout n'est pas blanc, tout n'est pas noir; je prends ce qui me convient et le reste je laisse. Et je garde bien à l'esprit que l'on gère des relations humaines, avec toute la part multifactorielle qui lui incombe. Pas de solution miracle en somme...
En bref, je pense qu'il faut combattre la sursimplification à outrance de certains contenus scientifiques en adoptant une attitude reflexive, en prenant un recul conséquent sur toutes ces questions.
Je laisse le mot de la fin à Bruno Della Chiesa (enseignant chercheur à la Harvard University Graduate School of Education) en notant un extrait des Cahiers pédagogiques n°527 (février 2016, p. 28) : "Je suggère que désormais, lorsque l'un ou l'autre d'entre nous sera amené à plonger un public pour la première fois dans le bain de la NE (ndlr: Neuro Education), nous commencions toujours le parcours initiatique en présentant les limites de la discipline et en soulignant l'importance d'apprendre à effectuer les distinctions: toute conversation, tout cours, tout programme de formation, tout produit éducatif (en ligne ou non), tout ouvrage dissertant de neurosciences éducatives devrait faire apparaître dans son introduction, un panneau danger: ne jamais même commencer à discuter des potentiels bénéfices de cette discipline, qui sont bien réels, sans d'abord en faire comprendre les tenants et les aboutissants, et mettre en garde contre les potentiels détournements, abus et dangers."
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