[Education] Mon enfant mord... je fais quoi?
Publié le 29 Septembre 2016
Hier ma fille a mordu mon fils. Pleins de questionnements, de remises en question émergent. Je vous livre ici le fruit de mes recherches et de ma réflexion. Evidemment, cela reste de l'analyse, de la théorie. Gardons tous en tête ces schémas et tentons de faire au mieux... Personne n'a dit que c'était facile.
Au commencement étaient les causes...
Il paraît important de rappeler que la cause d'un comportement agressif, quel qu'il soit, est habituellement une forme de stress. Parfois cela peut relever d'un traumatisme non guéri. En bref, des sentiments douloureux peuvent se trouver (dans la quasi totalité des cas) à l'origine de l'agressivité d'un enfant. Aletha Solter écrit "Un passif de maltraitance, de négligences, de discipline autoritaire, d'événements effrayants, d'interventions médicales ou d'agressions commises par ses pairs peut amener un enfant à frapper, mordre, ou brutaliser les autres" (Développer le lien parent-enfant par le jeu, p. 104). Mais elle note plus loin que le comportement agressif peut est aussi être lié à une accumulation de frustrations quotidiennes, de déceptions, de stimulations excessives ou de besoins non satisfaits. En bref, il s'agit de rechercher la cause de ce comportement jugé comme déviant.
Isabelle Filliozat, dans son livre J'ai tout essayé, nous livre quelques réflexions sur ce sujet (p. 88) :
"1. Petit, il fait tout cela de manière expérimentale, comme il le ferait avec des jouets. Il n'a pas l'intention de faire mal et ne réalise pas vraiment le lien entre son acte et la souffrance de l'autre.
2. Il teste son pouvoir de déclencher des cris... Mais n'éprouve pas forçément de colère envers sa victime.
3. Les enfants de deux ans poussent, tapent ou mordent le gêneur. La encore, pas de méchanceté, ils tentent de bousculer l'obstacle.
4. Parfois, il s'agit réellement de violence, ils cherche à "faire la force". Quand il n'arrive pas à se faire entendre, parce qu'il n'a pas encore les mots, son corps agit. Ce n'est pas une décision consciente, mais une prise en charge corporelle de son expression "J'en ai assez! J'existe! Je veux ma place!".
5. Bébé, il ne savait pas encore lâcher volontairement. Sous stress, le petit peut ne pas trouver tout de suite la commande "lâcher". Inutile de lui crier de lâcher, mieux vaut l'aider en lui ouvrant la main pour libérer les cheveux de sa soeur."
Le fait de mordre concerne de très nombreux enfants, en particulier avant l’âge de 3 ans. Malgré tout ce que l'on pourrait penser, les jeunes enfants n’ont pas l’intention de faire mal en mordant. Comme le note Isabelle Filliozat, leur cerveau n’est pas encore assez mature pour comprendre les conséquences de leurs gestes. Ils agissent ainsi parce qu’ils manquent de vocabulaire pour s’exprimer et qu’ils n’arrivent pas à bien gérer leurs émotions.
En résumé, les causes sont multiples: éprouver un sentiment de colère, vouloir un objet, être fatigué, vivre un évenement stressant (naissance d'un bébé, déménagement, entrée à l'école...), avoir faim, vouloir attirer l'attention d'un adulte, tenter de se défendre... Et n'oublions pas non plus la cause des poussées dentaires. Dans cet épisode douloureux, le fait de mordre peut soulager l'inconfort eprouvé sur les gencives.
... Et on fait quoi?
Ok, et une fois qu'on a trouvé la cause, on fait quoi? Les auteurs que j'ai pu lire sur le sujet sont tous d'accord sur un point. Au lieu de chercher à punir l'enfant pour son comportement agressif ou de lui faire la morale sur ce qui est bien/pas bien, il est préférable de chercher un moyen d'aider son enfant à se libérer de ses émotions pénibles, sans nuire à autrui évidemment.
Dans l'instant, il est conseillé de rester calme, une sur-réaction pourrait encourager l'enfant qui cherche à attirer l'attention à recommencer. Adèle Faber et Elaine Mazlish recommandent de s'occuper en premier lieu de l'enfant mordu (le consoler, le soigner...). Ensuite, on s'adresse au mordeur. On peut lui expliquer de façon claire et concise que l'on ne veut pas qu'il morde. Ou alors on peut lui poser des questions afin de l'amener à comprendre par lui-meme que ce comportement est déviant, en développant ses compétences sociales d'empathie ("Pourquoi ta soeur pleure?"...). Il n'est pas nécessaire que le mordeur fasse un câlin ou des excuses à sa "victime" car il n'en a certainement pas envie et ferait tout ceci dans le but de faire plaisir à l'adulte. Il est recommandé d'éviter des phrases du genre "Tu es méchant" car les conséquences sur l'estime de soi sont importantes. Et surtout, ne mordez jamais en retour!!! C'est une violence et on n'apprend pas à un enfant à stopper les violences en étant violent nous-même. Et je dirais même que cela peut être pire car en le mordant l'enfant pourrait en déduire que le comportement est acceptable puisque l'adulte le fait et que l'enfant agit par mimétisme.
La compréhension de l'acte, la mise en avant de la cause est donc primordiale. Une fois la cause identifiée (fatigue, faim, frustration, colère...) on peut agir dessus. Pourquoi ne pas proposer une bouteille de retour au calme ou un coussin de colère aux enfants qui en ont besoin et qui trouvent un intérêt à ces parades défoulantes? Dans les instants qui suivent il est aussi conseillé de valoriser son enfant lorsqu'un geste positif est fait. Cela relève du renforcement positif. Dans les semaines qui suivent, l'adulte doit rester en alerte car l'enfant est susceptible de recommencer. Pour ma part, j'ai expliqué à mon fils aîné (la victime donc...) quelle attitude adopter si cela devait se reproduire, à savoir avoir un geste de recul (car il a tendance à rester spectateur en cas d'attaque, il ne manifeste aucun geste de défense).
De plus, le travail sur les émotions paraît primordial. Les identifier, les nommes, les gérer... Vaste programme. Colère, tristesse, joie... etc... sont travaillées à la maison à partir de livres jeunesse par exemple. J'en avais présenté quelques-uns ici.
Pour terminer, Aletha Solter (Développer le lien parent-enfant par le jeu) liste des exemples d'activités ludiques permettant de lutter contre les comportements agressifs:
- le jeu libre, non dirigé
- les jeux actifs de renversement de pouvoir, comme une bataille d'oreiller par exemple
- les jeux d'absurdités, comme l'exageration fantaisiste de colère
- le jeu symbolique par le biais d'un thème lié aux événements stressants à l'origine de l'agressivité de l'enfant.
Pour aller plus loin...