Après la loi, on fait quoi? Après la législation, place à l'action !
Publié le 23 Décembre 2016
Hier, 22 Décembre 2016, l'Assemblée Nationale a voté l’article 68 du projet de loi « Égalité et Citoyenneté » par l’Assemblée nationale, l’article 371-1 du Code civil précise désormais que l’exercice de l’autorité parentale exclut « tout traitement cruel, dégradant ou humiliant, y compris tout recours aux violences corporelles. » (cf. billet d'hier pour les détails)
L'annonce de cette nouvelle a suscité de vives réactions, dans un sens comme dans l'autre. De ce fait, je tiens à préciser quelques petites choses.
Tout d'abord, cette loi CIVILE (donc sans sanction pénale) est un SIGNAL FORT envoyé aux parents et autres éducateurs d'enfants. Elle permet et permettra de changer le regard que chacun porte sur l'enfant dans notre société. Cette loi n'est pas l'Etat qui s'invite chez nous pour scruter par un petit trou si on fait "bien" ou "mal". Cette loi c'est une petite voix qui se met dans nos têtes pour nous dire "Protège l'intégrité physique et psychologique de ton enfant, Donne-toi les moyens pour cela... et moi, l'Etat, je vais maintenant te donner les moyens pour".
Ensuite, cette loi protège les enfants de toute violence physique, psychologique et verbale. Il n'est pas écrit que la génération qui va suivre sera reine. Beaucoup sont les gens à confondre éducation respectueuse et laxisme. Le laxisme est une violence! Evidemment que les enfants ont besoin d'un CADRE SECURITAIRE et SECURISANT. Dans une éducation respectueuse, les règles et les consignes sont bel et bien présentes. Elles sont indispensables, et se doivent d'être réfléchies et investies. Il n'est pas question du "no limit" dans cette loi, "simplement" de respect mutuel. La base.
De plus, comme je le notais hier, l’objectif de la loi est une interdiction symbolique, pour favoriser une prise de conscience et changer l’attitude des adultes envers les enfants. Comme dit précédemment, la règle posée est de nature exclusivement civile et ne s’accompagne d’aucune sanction. De ce fait, il est nécessaire que cette loi soit accompagnée de campagnes d’information et de sensibilisation de l’ensemble de la société (enfants, parents, professionnels de l’enfance et de la santé…) et de mesures d’aide et de soutien aux parents afin de privilégier un accompagnement respectueux des enfants.
Ce sont les actions qui vont être mises en place maintenant qui seront importantes. Cette loi n'est qu'un point de départ.
Cette loi n'a pas pour objectif de culpabiliser ou faire culpabiliser, comme j'ai pu le lire. Elle est là pour faire réfléchir. Nous sommes tous humains. Parents dépassés ou fatigués, professionnels parfois peu ou mal formés... Nous faisons tous des erreurs et en avons plus ou moins conscience. A partir de maintenant, plus de moyens seront mis pour nous donner les clés. Voici quelques exemples.
La loi devra être accompagnée d’une campagne régulière et permanente pour informer de l’existence de la loi d’interdiction des punitions corporelles. Il sera nécessaire d’accompagner la loi auprès du grand public et des professionnels de la petite enfance, à travers notamment :
1. Une campagne d’information du Ministère de grande ampleur. Cette campagne permettra de porter à la connaissance du grand public les dernières avancées scientifiques en la matière, et les conséquences de la violence éducative ordinaire sur la santé physique et mentale.
→ Cette campagne d’information devra être régulière et permanente
→ Elle reposera sur différents supports (spots diffusés à la télévision, à la radio ou sur Internet ; conseils imprimés sur bouteilles d’eau ou pack de lait : avec des messages positifs pour les parents et clairs ; émissions, documentaires, interviews de professionnels qualifiés diffusés à une heure de grande écoute ou le week-end ; diffusion de documents (affiches, tracts et brochures) mis à la disposition des enfants à l’école, des parents à leur domicile (ex. : « Pouvez-vous élever vos enfants avec succès sans gifle ni fessée ? » comme en Suède, distribuée dans toutes les familles et traduites en plusieurs langues) dans les PMI, les cabinets médicaux, les maternités… ; inscription dans le carnet de santé de l’interdiction et des conséquences sur la santé
→ L’intégration des connaissances sur les punitions corporelles et sur des droits de l’enfant dans les formations initiale et continue des enseignants, des professionnels de l’enfance, de la santé, des travailleurs sociaux, de la police et des magistrats. De plus nombreuses filières spécialisées dans l’enfance devront être créées.
2. La mise en place de moyens supplémentaires permettant d’aider les parents :
→ renforcement des congés parentaux pour que les parents passent plus de temps avec leurs enfants
→ formation des parents sur les étapes de développement de l’enfant et sur la théorie de l’attachement
→ lieux de rencontre et de réflexion sur l’éducation, la parentalité (meilleur maillage du territoire des maisons vertes, des REAAP - Réseau d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents, PMI, des écoles des parents, des associations soumises à évaluation)
→ mise en place d’un entretien individuel avec les parents ou en petits groupes (groupes de pères, de mères, ou ensemble) avant l’accouchement, puis pendant la première année de l’enfant…
→ conseillers et autres programmes d’aide, de formation et de soutien vers lesquels les adultes enfreignant la loi devront être orientés : possibilités d’assister à 10 séances d’aide à la parentalité → proposition d'un numéro anonyme d’appel et d'un tchat anonyme pour les enfants et les adolescents pour l’écoute, l’aide, le conseil, l’orientation
→ proposition d'un numéro anonyme pour les parents (écoute, aide, conseil, orientation)
→ renforcement des moyens et champs d’application du numéro d’appel gratuit 119 avec une cellule dédiée à la violence éducative ordinaire
3. Le lancement d'une étude longitudinale et d'une enquête de grande ampleur pour avoir des chiffres et statistiques fiables en France afin de constater la baisse de la violence dans les prochaines années.
4. La prévision d'une mission d’évaluation des moyens mis en place, de la coordination des services et notamment du temps effectif passé par les travailleurs sociaux avec les familles.
[Extrait du dossier de presse de l'OVEO et StopVEO Enfance sans violences]
Après la législation, place à l'action! Et vous, que proposeriez-vous ???