[Humeurs] Ai-je le droit à l'erreur en tant que parent ?
Publié le 17 Août 2017
Puis-je me tromper ?
Ai-je le droit de me tromper ? Perfectionniste ayant l'envie de bien faire, j'ai longtemps cru que non. Et puis l'expérience m'a fait grandir. La performance, la perfection.. autant de données qui sont susceptibles de rejeter l'erreur. Je ne suis pas là pour faire l'apologie de l'erreur, mais pour livrer ma réflexion personnelle sur cette notion.
Comment puis-je m'interdire de me tromper, tout en prônant le fait que mes enfants et mes élèves ont le droit de se tromper ? Ne leur dis-je pas souvent qu'il est formateur de se tromper ? En effet, l'erreur est une étape essentielle de l'apprentissage pour l'enfant... et, de fait, pour le parent aussi ! Elle est source d'enseignement.
Erreur ou faute ?
Faute et erreur sont deux notions très proches mais incluant une légère nuance. Ces mots font tous deux référence au sentiment de se tromper.
- Une faute (altération du latin falsus, faux) désigne un manquement à une règle (morale, scientifique, artistique...), à une norme;
- Une erreur (du latin error, errer d'où incertitude, ignorance) n'est rien d'autre qu'une méprise, une action inconsidérée, voire regrettable, un défaut de jugement ou d'appréciation.
Gheorghe Doca rappelle que « les fautes sont liées à la performance » (on en est immédiatement conscient : lorsque l'on attire notre attention sur elles, on a la possibilité de faire soi-même la correction parce qu'on connaît les règles) tandis que « les erreurs sont liées à la compétence » (on les fait de façon inconsciente et involontaire, faute de connaissance suffisante de la règle). Les linguistes opèrent donc une distinction reposant sur la notion de responsabilité (voire de culpabilité). Ainsi, par définition, nous serions responsables de nos fautes, car chacun de nous se doit de connaître les règles et autres lois. En revanche, une erreur serait alors commise de involontairement, c'est-à-dire par inattention, par maladresse, par oubli, par ignorance...
Ici j'évoque à la fois la faute comme l'erreur, dans notre quête de parents.
Le droit à l'erreur chez l'adulte comme chez l'enfant
Pour l'enfant on reconnaît le droit à l'erreur, on le prend en compte. Pour le parent c'est pareil. Un parent a le droit de se tromper, sans stigmatisation. Je disais plus haut que l'idée n'était pas de faire l'apologie de l'erreur, mais gardons toujours en tête qu'un enfant a besoin d'un parent authentique, pas d'un parent parfait. Un enfant a besoin de savoir que son parent a des failles, comme lui, et qu'il lui montre l'exemple pour vivre au mieux avec.
Penser qu'on n'a pas le droit à l'erreur quand on est parent est un des facteurs de burn-out mis en avant par Violaine Géricault dans son ouvrage sur l'épuisement maternel. En effet, il y a un énorme écart entre le modèle du parent que l'on voudrait être et ce que l'on peut vivre au quotidien.
L'enfant est un être apprenant, l'élève est un apprenant... et le parent l'est tout autant! Être parent, ça s'apprend. Le jour de l'accouchement, le manuel d'instruction ou guide de survie n'est pas livré. L'apprentissage n'est pas un processus linéaire. On essaie. On tâtonne. On se trompe. On fait des erreurs. On rencontre des échecs aussi. Et ensuite? On s'auto-flagelle? On minimise?
De l'importance du feed-back
C'est là que le feedback entre en action. C'est une étape essentielle, sinon on deviendrait lathophobe (non je n'ai pas fait de pari pour placer ce mot... il s'agit de l'aversion pour les faites ou les erreurs qui pourraient être commises).
On a donc le droit à l'erreur. Mais le plus important reste ce que l'on fait de cette dernière. Comme on l'enseigne aux enfants, le retour réflexif sur l’erreur est une voie propice à l'amélioration et au changement. Si réparation il doit y avoir, assumons aussi! Après tout, on ne peut que faire mieux, non?
De la nuance...
Evidemment, il y a deux poids deux mesures. Le monde ne tourne pas autour d'une organisation manichéenne. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit (enfin, écrit). Toutes proportions gardées, je maintiens qu'on a le droit à l'erreur... mais dans la limite de l'intégrité. J'éclaire mon propos: quand on maltraite son enfant on est au-delà de l'erreur.
Mais si je commets l'irréparable et que je frappe mon enfant, je fais quoi? Je m'auto-flagelle jusqu'à la fin de mes jours? En tout premier lieu il apparaît primordial de prendre conscience de son geste. Dans un second temps, il est conseillé de comprendre ce qui a motivé le geste. Ensuite, il s'agit de se trouver en empathie avec l'enfant, la victime. S'excuser, le comprendre, verbaliser ce qui a pu se passer en lui... et ce qui s'est passé en nous. Il s'agit d'être franc et de s'en tenir à la blessure et aux émotions, sans cherche une quelconque minimisation du geste, ni excuse, ni justification, qui tendrait à rendre l'enfant coupable. Le seul coupable c'est l'adulte. On peut donc toujours faire mieux, comprendre ce qu'il s'est passé pour faire en sorte que cela ne se reproduise pas.
En bref...
En bref, la parentalité est un apprentissage et l’erreur est un impondérable de l’acte d’apprendre. "Omniprésente, multiforme, pernicieuse, maligne, entêtante, saugrenue, obstinée ou accoucheuse, révélatrice, elle est encore souvent mal perçue" voire sanctionnée. On a le droit de se tromper, si c'est pour mieux se remettre en question et tenter de faire mieux ensuite.
On peut avoir des remords. Des regrets. Mais n'oublions pas une chose: il n'est jamais trop tard pour changer et s'améliorer.
Citation extraite des Cahiers Pédagogiques n°494